L’utilisation des drones au Benin
Au Bénin l’agriculture constitue un secteur stratégique pour le développement économique et social eu égard à sa contribution au Produit Intérieur Brut et à la création d’emplois. Le secteur présente cependant de grandes limites notamment les faibles productivités et production des filières agricoles prioritaires, la faible capacité de résilience des producteurs face aux effets de changements climatiques, de la dégradation des terres et de la gestion des risques climatiques. Ces faiblesses sont dues entre autres à l’utilisation des outils traditionnels et un faible taux d’adoption de semences améliorées, à la non maîtrise de l’eau, à l’insuffisance de l’encadrement technique, à l’insuffisance d’infrastructures, etc. Ces limites représentent une grande menace pour la sécurité alimentaire des générations actuelles et futures. En effet, d’ici à 2050, la population du Bénin va doubler augmentant donc significativement les besoins alimentaires du pays. Les producteurs auront donc à doubler (au moins) la production actuelle pour espérer satisfaire cette demande. Ceci les appelle à être plus efficace, plus productifs tout en obtenant un meilleur revenu de leurs activités.
Ces objectifs peuvent être atteint en utilisant des outils de l’agriculture de précision tels que les systèmes aériens sans pilote (UAV) – communément appelé drones. Cependant, les drones ne sont pas encore très bien connus au Bénin malgré la popularité croissante des UAV auprès des amateurs à des fins de loisirs et pour faire des photos et vidéos commerciales. Au Bénin les drones ont été utilisés pour la première fois en 2013 dans le domaine de l’audiovisuel par l’Office de Radiodiffusion et Télévision du Bénin (ORTB). Les drones ont été utilisés aussi dans le domaine de la conservation des ressources naturelles par la startup béninoise Global Partners (GP). Cependant dans l’agriculture, le sujet était encore nouveau jusqu’en 2017 où Global Partners a développé et mise en œuvre des projets avec le soutien du CTA et de l’Université du Kentucky aux Etats-Unis qui visent à offrir des services agricoles de précision aux petits exploitants béninois. À l’aide d’un système d’imagerie multispectrale monté sur UAV, Global Partners aide les agriculteurs à surveiller la santé de leurs cultures, à évaluer les besoins des plantes en nutriments et à en déduire des recommandations en matière d’engrais. Ces services peuvent aider les petits exploitants à accroître leurs productivités et production agricole et à améliorer leurs revenus. L’un des projets porte sur l’évaluation de la viabilité des services de drones dans un contexte d’agriculture familiale notamment avec les producteurs rizicoles. Le but principal du projet est de contribuer à comprendre si les petits exploitants agissant sur la base de conseils basés sur des données générées par des systèmes aériens sans pilote (UAS) augmentent leur revenu net et / ou réduisent leurs coûts lors de la culture du riz dans les rizières au Bénin. L’un des objectifs spécifiques du projet est d’évaluer l’acceptabilité et le consentement à payer des petits producteurs rizicoles pour les services de drones. En effet, l’acceptabilité et le prix que les producteurs sont prêts à payer sont des déterminants majeurs de la réussite d’introduction des drones dans l’agriculture.
Méthodologie et collecte de données
Pour répondre à cette question, le projet a adopté une expérience contrôlée randomisée dans la commune de Glazoué qui est l’un des deux pôles de développement rizicole au Bénin.
En vue de bien évaluer l’impact en fin de projet, des données de références ont été collectées en Novembre et Décembre 2017 sur un total de 232 riziculteurs. Lors de cette phase, des images de drones ont été présentées et des explications sur leurs avantages ont été données aux producteurs. A la suite de cela, des données ont été collectées sur leurs perceptions et préférences pour l’utilisation des drones, les éléments appréciés dans les drones ainsi que le prix qu’ils sont prêts à payer pour quelques services. Ainsi ces prix proposés « déclarés » par les producteurs se basent donc sur leurs compréhensions et perceptions des avantages de l’utilisation des drones dans leurs activités rizicoles.
Résultats
Perception des riziculteurs et avantages des drones les plus appréciés
Les résultats ont montré que plus de la moitié (52,59%) ont trouvé les services de drones très intéressant alors que 46,12% l’ont trouvé intéressant. Ainsi, la quasi-totalité des producteurs rizicoles ont perçu l’utilisation des services de drones comme un moyen intéressant pour l’accroissement de leur productivité, production et de leurs revenus rizicoles. S’agissant des avantages de drones les plus appréciés dans le domaine de l’agriculture, près de la moitié des producteurs (45,45%) ont apprécié en premier lieu la facilité et la libre circulation que les drones offrent lors de l’entretien des cultures. Le second avantage le plus apprécié par les riziculteurs est l’utilisation efficiente des herbicides (37,36%) alors que 11,69% des riziculteurs ont mentionné l’utilisation efficiente des engrais comme l’avantage le plus apprécié. Ainsi, les trois avantages les plus appréciés par les riziculteurs de Glazoué dans l’utilisation des services de drones sont la facilité et la libre circulation lors de l’entretien des cultures, l’utilisation efficiente des herbicides et l’utilisation efficiente des engrais.
Consentement à payer des riziculteurs pour les services de drones
Les résultats révèlent que la majorité des producteurs sont prêt à payer moins de 5000FCFA/ha (7,62euros/ha) pour les services de drones[1]. En effet, ils sont respectivement 70,56%, 70% et 66,67% à vouloir payer moins de 5000FCFA/ha pour les services d’identification des attaques, d’application de pesticide et d’épandage d’engrais.
Ainsi, il ressort que les producteurs souhaitent payer moins de 5000FCFA/ha pour les services de drones. Sur la base de leurs déclarations de prix, on note que les riziculteurs souhaitent payer en moyenne 3345FCFA/ha (5,10 euros/ha) pour l’identification des attaques contre 8510FCFA/ha (12,97euros/ha) dépensé en moyenne pour la même opération faite par les hommes soit une réduction de 60,7%. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que les producteurs perçoivent le drone comme une technologie qui réduit significativement le temps nécessaire pour accomplir les différentes opérations culturales. De plus, les technologies sont supposées réduire les couts des opérations de sorte à augmenter la rentabilité de l’activité. S’agissant de l’épandage d’engrais, le consentement à payer moyen est de 2597FCFA/ha (3,96 euros) soit à peu près le tiers du cout de l’épandage manuelle (7500FCFA/ha) dans la commune. Par contre, en ce qui concerne l’application de pesticide, les producteurs sont prêts à payer 3391FCFA/ha contre 3218 FCFA/ha payé en moyenne aux spécialistes de l’application de pesticide soit un accroissement de 5,38%.
Cet accroissement quoique petit, peut être expliqué par le fait que les riziculteurs perçoivent les drones comme capables d’appliquer les pesticides en un temps record et de façon efficiente les intrants. Ils sont donc prêts à augmenter légèrement le prix sachant que cela sera récupéré dans la quantité d’intrant utilisé.
Leçons à tirer
Cette étude conduite au Bénin sur les riziculteurs montre que les producteurs ont une bonne perception des drones et en apprécient les avantages. Il ressort des analyses que les riziculteurs sont prêt à utiliser les services des drones pour accomplir certaines opérations culturales notamment l’identification des attaques, l’application de pesticide et l’épandage d’engrais. Cependant, ils désirent payer moins pour ces services comparés à ce qu’ils payent déjà actuellement aux ouvriers. Pour une meilleure adoption de cette technologie, les producteurs préconisent la sensibilisation, les couts de services réduits et la disponibilité permanente de la technologie. Beaucoup d’entre eux sont impatients de recevoir le traitement dans le cadre du projet et surtout les résultats au niveau du rendement et de leur revenu. Les drones ont donc un avenir prometteur auprès des petites et moyennes exploitations au Bénin.
[1] 1 euro = 656,15 FCFA
Très émouvant et à encourager. L’utilisation des drones dans l’agriculture contribuera énormément dans la prospérité de l’agriculture béninoise. Tenez nous informer chaque fois qu’il y a de nouvelles découvertes afin d’améliorer à notre niveau aussi. Je suis dans le plateau, notamment à Pobè.
Merci pour votre commentire